
Le maritime, un horizon de souveraineté pour la France
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La France possède le deuxième domaine maritime mondial. Pourtant, sa puissance maritime reste sous-exploitée et insuffisamment structurée. Face aux tensions géopolitiques, aux transitions économiques et à la montée en puissance de nouveaux acteurs, il est temps de faire de la mer un pilier stratégique de souveraineté.
Une richesse maritime encore en quête de stratégie nationale
Avec 11 millions de km² de zone économique exclusive (ZEE), répartis sur tous les océans, la France dispose d’un atout géopolitique unique. Cette présence planétaire lui confère des responsabilités en matière de sécurité, de protection de la biodiversité, d’accès aux ressources et de projection d’influence.
Mais cette richesse peine à se traduire en puissance effective. Le secteur maritime français est fragmenté : industriellement dispersé, administrativement complexe et politiquement marginalisé. Les ports manquent d’investissements, la flotte de commerce décroît, la formation maritime souffre d’un déficit d’attractivité, et la recherche peine à structurer des programmes d’excellence.
Pendant ce temps, d’autres puissances, comme la Chine, les États-Unis ou la Turquie, investissent massivement dans le maritime : construction navale, routes commerciales, data sous-marine, ressources énergétiques, souveraineté alimentaire.
Le manque de coordination stratégique empêche la France de capitaliser sur sa position géographique, économique et militaire. La mer est perçue comme un enjeu sectoriel, alors qu’elle devrait être pensée comme un levier transversal de puissance.
Vers une politique maritime intégrée, industrielle et souveraine
Révéler le potentiel maritime français exige une vision politique ambitieuse et cohérente, mobilisant l’ensemble des filières et des territoires littoraux.
Plusieurs priorités structurantes émergent :
- Renforcer la souveraineté industrielle maritime : moderniser les chantiers navals, soutenir la filière du naval de défense, développer une industrie de construction et de maintenance écologique, et structurer les écosystèmes autour des ports.
- Faire des ports des hubs de résilience et de compétitivité : investir dans la décarbonation, la digitalisation, la connectivité logistique. Les ports doivent devenir des plateformes de services intégrés, au cœur des chaînes de valeur stratégiques européennes.
- Accélérer la transition écologique de l’économie bleue : énergies marines renouvelables, biotechnologies marines, pêche durable, lutte contre la pollution plastique. La mer est à la fois un espace de solutions et un bien commun à préserver.
- Affirmer une diplomatie maritime proactive : défendre le droit international, promouvoir la gouvernance des biens communs océaniques, protéger les câbles sous-marins, sécuriser les routes commerciales et soutenir les Outre-mer comme avant-postes stratégiques.
- Faire émerger une culture maritime nationale : revaloriser les formations, sensibiliser à la géopolitique de la mer, ancrer l’identité maritime dans l’imaginaire collectif français.
La construction d’une stratégie maritime nationale doit aussi s’inscrire dans une ambition européenne, articulée autour d’une souveraineté partagée : flotte commune, ports connectés, R&D bleue, diplomatie maritime.
La mer, prochaine frontière de la souveraineté française
Le 21e siècle sera maritime ou ne sera pas. Pour peser dans les recompositions globales, sécuriser ses approvisionnements et réindustrialiser ses territoires, la France doit se penser comme puissance maritime intégrée.
Au carrefour de l’écologie, de l’économie, de la défense et de l’innovation, la mer incarne un champ d’opportunités immenses. Encore faut-il en faire un choix stratégique, durable, structuré. Une nouvelle frontière : bleue, souveraine et décisive.